Interview Georges Buisson

( down-tempo.net)Dans ce partenariat inédit entre le Palais et le festival. Qui a démarché l'autre en premier ?
( Georges Buisson) J'aurais tendance à dire cela s'est fait presque en même temps. Imaginer le Printemps de Bourges sans une manière de rencontrer ce haut-lieu du patrimoine eut été étonnant. C'est vrai que le Printemps de Bourges est un autre fleuron de la ville. Ce monument avec la cathédrale en est sans doute le symbole le plus fort. Que ces deux événements dans la ville s'ignorent faisait un peu bizarre... Et puis cela correspondait aussi à une nouvelle politique initiée en 2000 par la Caisse des Monuments Historiques refondue dans un établissement public: le centre des Monuments nationaux (Monum). Refondu avec des missions un peu nouvelles, notamment des missions d'ouverture, d'élargissement des publics. Faire en sorte que ces lieux qui appartiennent à l'État puissent être des lieux qui ne soient pas refermés sur eux-mêmes – ce qui était un peu leur tendance générale, malheureusement. Je prends souvent les exemples des ambassades, des lieux avec une territorialité d'État dans une collectivité locale...
( down-tempo.net)On s'inscrit donc la cité...
( Georges Buisson) Voilà, complètement. Inscrire ces lieux qui appartiennent à l'État dans une synergie active avec leur environnement, avec une volonté de toucher des publics différents, notamment des publics plus jeunes. Un monument comme celui-ci se visite pour lui-même mais on pouvait réfléchir à d'autres missions. Le Palais outre le fait qu'il a été la grande maison de Jacques Cœur est par la suite devenu L'hôtel des échevins, l'équivalent de l'hôtel de ville, puis palais de Justice. C'est d'ailleurs là qu'il a subi les pires outrages, pour son aménagement . Ces lieux ont toujours eu une fonction. Et paradoxalement depuis qu'ils ont été classés monument national ils n'ont que cette fonction-là. Ce qui est, à mon avis , dommageable.
( down-tempo.net)Monum a proposé d'autres lieux, d'autres bâtiments historiques à d'autres événements musicaux liés à la scène électronique ( Villa Noailles pour Aquaplaning) comment voyez-vous ce rôle de grand frère du Palais Jacques Cœur?
( Georges Buisson)D'abord cela démontrait qu'un lieu pouvait appartenir au patrimoine et en même temps avoir une réalité contemporaine. Ce qui se passe au Palais Jacques Cœur est assez emblématique de ce que cela peut être comme politique puisque les Audio Brunch ont lieu dans la salle des Festins Ainsi cette salle retrouve sa fonction originale - un lieu où on peut manger et écouter de la musique. Qu'aujourd'hui au 21eme siècle elle retrouve sa raison d'être ce pourquoi elle a été imaginée par les constructeurs de l'époque est tout à fait intéressant. Le danger pour un lieu comme ça c'est de faire dans le pléonasme. C'est de dire « on est dans un lieu historique, un lieu de Moyen-Âge alors on ne va faire que de la reconstitution ». Ne pas faire qu'un tel lieu puisse exister dans la culture serait terrible. Ces monuments ne sont pas uniquement des rétroviseurs. Ce sont aussi des lieux qui nous permettent d'appréhender notre époque et de voir l'avenir. Écouter de la musique électronique dans ce lieu est une autre manière de la percevoir, une autre manière de l'inscrire dans une histoire La musique électronique n'est pas "comme ça". Elle est nourrie par tout un tas d'antériorités qui sont fortes une manière de réinscrire un trait d'union actif à la fois pour le monument et pour les groupes. La rencontre se fait des deux côtés Quand on écoute la musique électronique dans la salle des Festins on ne perçoit pas la salle des Festins de la même manière que lorsqu'on la visite et en même je sui persuadé qu'à écouter de la musique d'aujourd'hui ici on ne l'écoute pas de la même manière. On a l'habitude de l'écouter dans d'autres contextes, d'autres lieux. Cela permet de la goûter, de la déguster autrement.
( down-tempo.net)Le Printemps de Bourges a voulu en faire une manifestation gratuite A ce titre-là elle est souvent annoncée comme en marge, un peu comme le cinéma pendant le Printemps de Bourges ou les scènes ouvertes. Cette situation vous satisfait-elle?
( Georges Buisson)C'est le problème du nombre de places. Les contraintes du monument notamment dans le domaine de la sécurité font que l'on ne peut pas accueillir plus de 130 personnes assises. On s'est aussi posé la question de mettre une billetterie en place... Je ne serai pas d'accord pour dire qu'il s'agit d'une manifestation gratuite. Les gens font un acte ( ndlr: le Palais Jacques Cœur est vraiment excentré par rapport aux autres lieux de spectacle du Printemps). Le danger d'une manifestation gratuite est de n'avoir que du public qui regarde, comme ça, en passant. Pour venir ici les gens doivent retirer des invitations à l'accueil du festival, c'est une démarche, une volonté d'assister à quelque chose de construit. en même temps c'est une vitrine dans un cadre singulier. Là l'expression du Printemps de Bourges n'existe pas comme elle existe ailleurs. C'est plus la cerise sur le gâteau qu'une manifestation banalisée parce qu'elle serait gratuite. Elle est de l'ordre de l'exceptionnel et comme toutes les choses exceptionnelles elle est goûteuse, elle est rare elle est un plus. C'est davantage dans ces termes qu'on l'a envisagée et qu'on l'a construite.
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Depuis trois ans le palais Jacques Cœur convie la crème de l'électronique pour quelques infidélités à la programmation plus 'maverick' du printemps de Bourges. Apartés dans la salle des festins vus par George Buisson , administrateur des lieux. Considérations architecturales et artistiques du lieu sont à mettre en parallèle avec les notions de vécu et de transmission . Si vous ne voyez dans un festival que l'occasion d'écluser des litres de bière dès votre réveil au camping cet entretien risque de vous surprendre...

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